Cher tous,
L’élection présidentielle est toujours un moment particulier dans la vie politique française. Un moment où 65 millions de français font le choix d’élire un homme ou une femme pour changer en profondeur notre quotidien et la société. Il est bien entendu que le président de la République dispose en France d’un pouvoir considérable, hérité, après moult tumultes, du pouvoir du Roi d’avant la mise en place de la République. En 2012 pourtant, il est clair que la France ne se dirige pas uniquement depuis l’Elysée au regard de la multitude d’échelons administratifs (commune, communauté de communes, département, région, Europe) et la situation de nos finances publiques…
Des finances publiques qui, après plusieurs années de crise, ne sont pas au plus fort : le déficit budgétaire de l’Etat varie depuis 30 ans entre 40 et 100Md€ (au plus dur de la crise), gouvernements de droite et de gauche confondus, pour des recettes fiscales de 250Md€ environ… sans oublier les 1 7000Md€ de dettes ! Du temps de la monarchie, la solution était toute « désignée » lorsqu’on approchait d’une faillite : soit l’on tuait les créanciers (les Lombards, les juifs etc), soit l’on trouvait de nouvelles ressources (Philippe le Bel fit ainsi emprisonner puis piller le trésor des Templiers en 1307), soit l’on faisait une guerre… Aujourd’hui, les méthodes sont plus « humaines » : on diminue les dépenses, on augmente les recettes et, entre temps, on fait marcher la planche à billet.
Bref, ce matin, François Hollande présentait son programme dont vous trouverez les grandes lignes résumées par l’AFP ci-dessous. L’ensemble est cohérent dans son ancrage à gauche toute mais – je crois – irréaliste d’un point de vue financier, avec des pointes de démagogie…
La meilleure des propositions reste sans aucun doute la réaffectation d’une partie de l’épargne française au financement de son industrie : c’est une manière utile de mobiliser l’épargne des français et de pérenniser l’emploi en France. Un peu sur le modèle de la Caisse des Dépôts et Consignations, dépositaire des fonds du Livret A et qui financent le logement social en France. Parmi les idées intéressantes mais qui méritent d’être développées : l’imposition différenciée de l’impôts sur les sociétés, le contrat de génération, l’indépendance de tous les magistrats…
Mon top 3 des mauvaises idées est le suivant :
– le retour à la retraite à 60 ans avec la totalité des annuités de cotisation : avec une population plus âgée et un système amené à être davantage déficitaire (moins d’actifs pour plus de retraités qui vivent plus longtemps), revenir à la retraite à 60 ans est une abbération économique. Qui plus est, une telle mesure met en risque le système par répartition français. Hollande a fait de la jeunesse sa priorité ? Et bien, ce sont les jeunes qui financeront le système de retraites à 60 ans aujourd’hui qui demain n’en bénéficieront pas…
– créer 150 000 emplois d’avenir et 60 000 postes supplémentaires dans l’éducation : Les emplois d’avenir sont la nouveauté sémantique des « emplois jeunes » de Lionel Jospin. C’est, en gros, un stage au SMIC quasi intégralement payé par l’Etat. Encore de la dépense publique… Quant aux 60 000 postes supplémentaires dans l’éducation, là encore, c’est incompréhensible : alors que le nombre d’élèves est moindre par rapport aux années 90, le nombre d’enseignants a augmenté ! Avec 1 100 000 personnels de l’Education Nationale, l’effectif est suffisant, seule l’organisation doit être repensée
– accorder le droit de vote aux étrangers aux élections locales : Quel Nation au monde ferait voter les étrangers aux élections locales dès lors qu’il n’y a pas de réciprocité en la matière ? Le droit de vote pour les étrangers doit être pensé lorsque celui ci est réciproque ! Si vous êtes citoyen de l’Union Européenne, vous avez déjà ce droit de vote. Conclure des accords bilatéraux pourquoi pas, c’est une forme de coopération intergouvernementale, cela se discute. En dehors de ce cadre, il faudra m’expliquer l’intérêt…
– (j’en rajoute une 4ème, je ne peux pas résister) Porter de 20 à 25% les obligations de construction de logement social : Personne ne conteste la légitimité et le besoin de logement social. Avant d’en augmenter le nombre, commençons par demander à tous de respecter les obligations et ensuite nous verrons. Et d’ailleurs, pourquoi 25% et non pas 30, 40 ou 50% ? Augmenter pour augmenter, ça n’a pas de sens. A défaut d’explication cohérente, c’est une ineptie. En revanche, la seconde partie de la proposition – à savoir favoriser la mixité sociale – est une bonne chose, déjà appliquée de facto dans de nombreux endroits, que les municipalités soient de gauche ou de droite.
Mon top 3 des propositions démagos :
– Séparer banques d’affaires et de dépôt et interdire les opérations spéculatives : Autant la séparation des activités bancaires est possible (elle existait en France jusqu’à ce que… François Mitterrand autorise la fusion en 1984 !), autant interdire les produits financiers, les stock-options, les paradis fiscaux, relève du voeu pieux inapplicable de manière unilatérale. La finance est mondialisée, en un clic, les capitaux traversent l’Atlantique : interdire uniquement en France est synonyme de délocalisation de capital, ce qui, j’ose espérer, est contraire à l’objectif poursuivi
– Annuler 29Md€ de niches fiscales « équitablement répartis entre les ménages et les entreprises » : Tout à coup, dès qu’il s’agit d’augmentation d’impôts, le flou se fait. Concrètement, piocher pratiquement 15Md€ dans la poche des ménages, on le fait comment ? On augmente quel impôt ou quelle taxe… Le flou est de mise, normal, ça n’est pas très « classe moyenne » comme mesure !
– Réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 à 50% et tarification progressive de l’eau, de l’électricité et du gaz : Réduire la part de nucléaire est très populaire aujourd’hui… mais combien ça coûte ? Quel sera le futur prix de l’électricité pour les français ? La France a fondé dans les années 70 une politique industrielle fondée sur un prix de l’électricité attractif pour les industries électro-intensives. Revenir dessus pour installer des panneaux solaires étrangers, en quoi cela bénéficiera-t-il au pays ? Quant à la tarification progressive, l’effet de seuil risque d’être sévère et contraire à l’objectif recherché.
Mon top 3 des « futurs renoncements » :
– les euro-obligations : mutualiser la dette européenne implique une politique budgétaire, économie et fiscale commune. La France seule n’y parviendra pas, surtout lorsque l’on connaît la résistance allemande en la matière..
– la contribution climat-énergie aux frontières de l’Europe : Comme pour la proposition précédente, Nicolas Sarkozy s’est heurté au refus des partenaires européens. L’idée est bonne mais ne rencontre pas de consensus politique européen…
– l’équilibre budgétaire en 2017 : Les prévisions de croissance retenues par le PS sont les mêmes que celles du gouvernement. Les mêmes donc que le PS critique en les jugeant surestimées et irréalistes. L’objectif d’atteindre l’équilibre budgétaire en 2017 me fait donc doucement sourire 🙂
PARIS, 26 janvier 2012 (AFP) – Principales mesures parmi les « 60 engagements pour la France » du candidat socialiste à l’Elysée François Hollande:
RELANCE DE LA PRODUCTION, DE L’EMPLOI ET DE LA CROISSANCE
– Création d’une Banque publique d’investissement et d’un Livret d’épargne industrie au profit des PME. Doublement du plafond du livret de développement durable- Rééquilibrage de l’impôt sur les sociétés au profit des PME et des TPE et au détriment des grandes entreprises- Couverture intégrale de la France en très haut débit d’ici à dix ans- Préservation du statut public des entreprises détenues majoritairement par l’Etat (EDF, SNCF, La Poste…)- Séparation des activités des banques « utiles à l’investissement et à l’emploi de leurs opérations spéculatives », bannissement des banques françaises des paradis fiscaux, interdiction des « produits financiers toxiques » et des stock-options, sauf pour les entreprises naissantes, encadrement des bonus et sur-taxation de 15% des bénéfices des banques- Réduction du déficit public à 3% du PIB et retour à l’équilibre fin 2017- Suppression de 29 milliards d’euros de niches fiscales « équitablement répartis entre les ménages et les entreprises »- Montée en puissance du financement des « priorités » jusqu’à 20 milliards d’euros en 2017- Coup d’arrêt à la révision générale des politiques publiques (RGPP) et à l’application « mécanique » du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux.
REFORME FISCALE
– Fusion à terme de l’impôt sur le revenu et de la CSG- Nouvelle tranche à 45% pour les revenus supérieurs à 150.000 euros par part et plafonnement à 10.000 euros de la diminution d’impôt tirée des niches fiscales- augmentation de 25% de l’allocation de rentrée scolaire dès septembre- abaissement du plafond du quotient familial pour les 5% de ménages les plus aisés- relèvement de l’impôt sur la fortune pour les plus gros patrimoines et abattement sur les successions ramené à 100.000 euros par enfant.
EDUCATION ET JEUNESSE
– création de 60.000 postes supplémentaires dans l’Education en 5 ans- augmentation de « 25% » de l’allocation de rentrée scolaire dès septembre- allocation d’études et de formation sous conditions de ressources- abrogation de la circulaire sur les étudiants étrangers
RETRAITES, SANTE
– départ à 60 ans pour ceux qui ot cotisé toutes leurs annuités. Pour le reste, négociation dès 2012 pour définir « âge légal, « montant des pensions notamment ».- augmentation de la part de rémunération forfaitaire des médecins généralistes. Encadrement des « dépassements d’honoraires », favoriser une baisse du prix des médicaments.- assistance médicalisée pour « terminer sa vie dans la dignité », dans des « conditions précises et strictes »
EMPLOI
– créer 150.000 emplois d’avenir pour l’insertion des jeunes- mettre fin à la défiscalisation et aux exonérations de charges sur les heures supplémentaires, sauf pour les TPE- « contrat de génération »: « permettre l’embauche par les entreprises, en CDI, de jeunes, accompagnés par un salarié plus expérimenté qui sera ainsi maintenu dans l’emploi jusqu’à son départ à la retraite ».- augmentation des cotisations chômage pour les entreprises qui abusent des emplois précaires- création de 1.000 postes par an pour la police, justice, gendarmerie- dès l’été 2012, réunion d’une grande conférence économique et sociale, « saisie des priorités du quiquennat »
SOCIETE, NUMERIQUE, ENVIRONNEMENT, ENERGIES
– l’obligation pour une commune de construire des logements sociaux est portée de 20 à 25%. Mixité sociale- banlieues: lancement d’opérations de renouvellement urbain. Maintien des services publics. Augmentation des moyens, notamment scolaires. Présence régulière des services de police.- remplacement de la loi Hadopi par une loi « signant l’acte 2 de l’exception culturelle »- lutte contre le « délit de faciès »- loi favorisant l’égalité professionnelle homme/femme- ouvrir le droit au mariage et à l’adoption aux couples homosexuels- réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 à 50% à l’horizon 2025- fermeture de la centrale de Fessenheim, poursuite du chantier de l’EPR de Flamanville
INSTITUTIONS
– loi de 1905 sur la séparation Eglise/Etat inscrite dans la Constitution, en tenant compte du statut de l’Alsace et Moselle- réforme du statut pénal du chef de l’Etat- droit de vote accordé aux étrangers aux élections locales- loi sur le non-cumul des mandats, introduction d’une part de proportionnelle aux législatives- Réduction de 30% de la rémunération du président et des ministres
EUROPE, INTERNATIONAL
– Proposition d’un « pacte de responsabilité, de gouvernance et de croissance », création d’euro-obligations et nouveau traité franco-allemand- Proposition d’une politique commerciale européenne anti-dumping social et environnemental- Contribution climat-énergie aux frontières de l’Europe- retrait immédiat de nos troupes d’Afghanistan