Cher tous,
Lire le programme présidentiel du parti socialiste de A à Z fut pour moi un long et douloureux chemin de croix. Bien entendu, tous les maux de la France ont commencé en 2002, soit après que Lionel Jospin ait quitté le pouvoir. Bien entendu et c’est bien connu, si tout va mal, c’est la faute de la droite !
C’est tellement su de tous qu’il est même rappelé que pendant la crise « C’est la commande publique – à commencer par celle des collectivités locales dirigées par la gauche – qui a préservé l’activité des entreprises » ; heureusement que les collectivités de gauche étaient là sinon on était vraiment mal…
D’ailleurs, c’est évident et tous les économistes vous le diront « Si la France s’en sort moins bien que d’autres en Europe, c’est parce qu’elle a subi le choc du sarkozysme ». Là, on est vraiment rassuré, ouf, la crise en fait, c’est la faute à Sarko ! CQFD remballez y’a rien à voir !
Mise à part cela, à la lecture du programme du PS, on s’inquiète fortement sur la capacité à faire autre chose qu’à dépenser encore et toujours plus :
– « nous proposerons à nos partenaires d’émettre des emprunts européens » (comme si l’Allemagne allait dire oui…),
– « nous créerons 300 000 emplois d’avenir » qui sont tellement d’avenir qu’ils « seront conçus sur le modèle des emplois jeunes » super ça marchait tellement bien à l’époque,
– « nous créerons une allocation d’étude sous conditions de ressources » comme ça les classes moyennes n’en bénéficieront pas plus que les logements du CROUS et seront encore les dindons de la farce,
– « nous rétablirons l’âge de la retraite à 60 ans » ce qui améliorera nettement le déficit des caisses de retraites,
– « l’accueil en crèche et la scolarisation à deux ans sera développé » pourquoi pas encore faudrait-il que les communes disposent des moyens financiers et humains pour le faire,
« pour améliorer la prise en charge des personnes âgées dépendantes, nous ferons appel à la solidarité nationale » surtout celle des actifs (NB : la dépendance, c’est une problématique de plusieurs milliards d’euros donc son financement n’est pas assuré en un claquement de doigt !),
– « nous fusionnerons l’impôt sur le revenu et la CSG » génial ce sont donc ceux qui paient l’impôt sur le revenu à l’heure actuelle qui paieront en plus pour ceux qui ne versent rien ! Tout ça rien que pour les hausses de dépenses et d’impôts c’est top ! Merci les éléphants roses 🙂
Après il y a aussi les fausses bonnes idées : « nous rendrons la TVA éco-modulable [sur les produits] ». En théorie, ça marche bien, en pratique, comment êtes-vous sûr de la quantité de CO2 produite par un bien étranger ? En gros, qu’est ce qui nous garantit que la Chine ne nous dira pas que ses produits sont tous sans impact sur les émissions de gaz à effet de serre lors de leur production ? Si on pousse l’idée, cette TVA éco-modulable ressemble à s’y méprendre à la taxe carbone qu’avait proposée l’UMP et que les français ne souhaitaient pas voir mise en oeuvre…
Les fausses bonnes intentions « nous demanderons aux jeunes médecins libéraux d’exercer en début de carrière dans les zones qui manquent de praticiens » ; concrètement aujourd’hui ils ont des incitations financières et même avec ça, ils n’y vont pas… Alors je ne suis pas sûr que les éléphants roses vont avec leurs beaux yeux faire en sorte de les convaincre…
Il y a aussi les idées qui figurent dans le document programme mais ne sont pas reprises dans les propositions comme amplifier la loi SRU et exiger 25% des logements sociaux pour les communes de plus de 3500 habitants contre 20% aujourd’hui. Y’aurait-il des élus PS qui trouvent cela un peu trop engageant pour ne pas le faire figurer dans les propositions ?
Comme je ne suis pas non plus dogmatique, je retiens quand même quelques bonnes idées : « nous généraliserons les achats publics vers l’agriculture et la pêche de proximité (…) en permettant d’introduire des clauses de proximité dans les marchés publics ». La promotion des circuits courts, je trouve cela intéressant et c’est une vraie difficulté à l’heure actuelle pour les collectivités territoriales.
Pour finir, je vous livre la perle du programme : le couplage de la fausse bonne idée couplée à la fausse bonne intention ; « nous baisserons l’impôts sur les sociétés de 33% à 20% pour les entreprises qui réinvestissent intégralement leurs bénéfices, (…) nous l’augmenterons jusque 40% pour celles qui privilégient les dividendes des actionnaires ». Sur un plan moral et éthique, cette mesure est bonne. Le Parti Socialiste oublie quand même que la France vit dans ce qu’on appelle l’Europe, où les hommes et les capitaux sont libres de circuler, et dans le monde, où les capitaux circulent très facilement. Les machines à cash qui distribuent des dividendes colossaux peuvent donc transférer sans vergogne leur siège social voire se rendre en Irlande – c’est juste à côté ! – où le taux d’imposition sur les sociétés est proche de 10%. En vase clos, la mesure est efficace. Dans un monde globalisé, c’est une mesurette inefficiente.
Pour résumer, le programme du PS est intéressant ; il serait parfait dans un monde sans crise, replié sur lui-même, avec beaucoup de croissance, sans endettement de notre pays, sans marchés financiers… Seulement voilà, il faut être pragmatique, ce n’est pas en niant une réalité qu’on la surmonte. Il faut donc savoir s’y adapter pour la faire évoluer…
De l’art de s’ouvrir sur l’extérieur